Lancement de la Ligne Info’Prison, un outil de récolte d’informations pour faire connaître la réalité carcérale

Ce mercredi 8 juillet 2020, une ligne téléphonique est mise en place à destination de celles et ceux qui ont un contact avec la réalité carcérale. De manière exceptionnelle, plusieurs organisations militantes se sont réunies pour permettre à toutes et tous de témoigner de cette réalité bien souvent opaque et hors de portée. Elles soulignent une nécessité urgente de s’allier face à la détresse actuelle des détenu·e·s et de leur proches et dénoncent un manque de transparence politique en la matière.  

Nous, l’Observatoire International des Prisons, la Ligue des droits humains, le Genepi Belgique et le Collectif de Luttes Anti-Carcérales (La CLAC), avons décidé de mettre en place la Ligne Info’Prison, afin d’obtenir des informations de la part de toutes personnes en contact avec la prison (détenu·e·s, familles, avocat·e·s, personnel pénitentiaire etc.). Cette alliance a pour but de transmettre au mieux ce qui se passe derrière les barreaux en prenant les informations à la source et en les rassemblant. L’objectif est d’informer le public de la réalité carcérale et d’exercer des pressions politiques quant aux réalités inacceptables de l’incarcération.

 

Des permanences téléphoniques sont ainsi organisées tous les mercredis et samedis à partir du 8 juillet. En appelant le 0498 51 51 91, ou via Whatsapp ou par e-mail (ligneinfoprison@bawet.org), les personnes confrontées à la prison pourront envoyer des informations sous toutes les formes. Ces supports et informations reçus seront anonymisé·e·s afin que l’expéditeur·rice ne puisse être (re)connu·e.

Un contexte particulier

Durant le confinement, les conditions de détention en Belgique se sont détériorées et les détenu·e·s se sont retrouvé·e·s livré·e·s à eux et elles-mêmes ; ce qui n’est, faut-il le souligner, qu’un renforcement de ce que constitue l’incarcération en temps normal. Envers les personnes détenues et leurs proches, le ministère de la Justice et les directions pénitentiaires adoptent une attitude qui ressemble moins à une gestion qu’à un mode de jeu.

Tout au long de cette période, de nombreuses lettres ont été adressées aux autorités qui n’y ont souvent pas répondu. Pourtant, le ministère de la Justice a un devoir d’information envers les détenu·e·s et leurs proches.  Le droit à l’information pour les personnes incarcérées et leurs proches ne peut être un privilège ou un cadeau. Ce droit est encore plus essentiel dans une période anxiogène comme celle de la crise sanitaire.

Il était évidemment indispensable de prendre des mesures pour éviter la propagation du virus en prison. Malheureusement, lorsque les autorités sortent du silence, l’inadéquation des réponses et des mesures prises pour gérer la crise sanitaire montre à nouveau le désintérêt, voire le mépris, envers les personnes détenues.

Ainsi, les proches des détenu·e·s sont traité·e·s depuis le début de la pandémie comme des éléments contaminants et dans le même temps, les agents pénitentiaires n’ont pas été mis en capacité de respecter la sécurité sanitaire.  Les visites des enfants sont encore interdites, méprisant le lien parental des détenu·e·s. Un nombre impressionnant de colis contenant des masques à l’initiative des familles, ont été refusés par les directions pénitentiaires qui n’offraient pas d’alternative. En outre, les plans réfléchis en termes de visites sont proposés depuis le début par les familles et n’ont reçu aucune réponse, favorable ou défavorable, alors qu’ils étaient pertinents.

Enfin, des réponses ont montré un simple mépris sans compréhension envers les détenu·e·s et leurs proches. Le cabinet répondait à des mamans « s’il est là, c’est qu’il le mérite« , renvoyait automatiquement vers une page descriptive de mesures sanitaires, lorsque des familles s’enquerraient d’une information de suicide.

Cette situation permet de comprendre le désespoir et la perte de confiance des détenu.e.s et de leurs proches envers les autorités. Elle donne du sens aux initiatives de protestations, comme lorsque les proches étaient prêts à braver les mesures du confinement et à se mettre en grève de la faim. Elle montre que les autorités manquent de bienveillance et de transparence envers le public dont elles doivent assurer le bien-être. Elle met en lumière l’impératif de s’organiser à ce sujet. C’est dans ce sens que s’inscrit la création de cette ligne téléphonique, et qu’ici a lieu, à nouveau, la demande de procéder impérativement à des changements concernant les conditions de visites et de communication envers les personnes enfermées et leurs proches.

Selon les mots de Malek, détenu à Jamioulx « S’ils n’arrivent pas à assumer des détenus en prison, qu’ils ne les y mettent pas pour des conneries« .

Télécharger le flyer.

Collectif de Luttes Anti-Carcérales (La CLAC)
Le Genepi Belgique
La Ligue des droits humains (LDH)
L’Observatoire International des Prisons (OIP)

8 juillet 2020