La LDH publie son rapport annuel : l’État des droits humains en Belgique, une année de libertés confinées

La Ligue des droits humains publie son rapport annuel : l’État des droits humains en Belgique, qui a pour vocation de faire le point sur l’année écoulée. Une analyse de l’année 2020 ne pouvait évidemment pas faire l’impasse sur les conséquences importantes de la pandémie. Mais elle ne saurait non plus s’en contenter. Car si certains motifs d’inquiétude sont propres aux mesures de crise, comme le confinement ou le suivi de contacts, d’autres ne sont en réalité que le prolongement de situations structurelles. En ce sens, la crise a plutôt permis de les mettre en lumière, d’accentuer certaines disparités qui n’en devenaient que plus visibles et parfois dramatiques.

La crise sanitaire et la manière dont elle fut gérée ont mis nos droits fondamentaux et libertés à rude épreuve. Si certaines violations de nos droits, tel que celui de circuler librement, furent inévitables pour enrayer la pandémie, d’autres auraient sans aucun doute pu être évitées. A ce titre, citons notamment et de façon non-exhaustive, les lourdes atteintes portées aux droits fondamentaux des personnes résidents en maisons de repos et de soins ; le droit à l’accueil mis à mal par une procédure digitale et les personnes restées enfermées en centres fermés alors que n’étant plus possible d’organiser leur départ forcé, il n’y avait plus de base légale permettant de justifier leur enfermement ; les droits des personnes détenues qui ont très vite été confrontées à une rupture sociale brutale, perdant tout contact avec l’extérieur durant de nombreux jours, voire semaines dans certains cas.

L’année 2020 a également été irrévocablement marquée par les violences policières. Loin d’être nouvelle, cette problématique a été propulsée sur le devant de la scène médiatique. Face à la crise sanitaire, on aurait pu espérer une réponse politique solidaire et inclusive, mobilisant les secteurs publics et sociaux pour sensibiliser, orienter et accompagner la population à travers cette épreuve. Or, face aux désinvestissements massifs de ces secteurs et au manque de moyens, les forces de l’ordre se sont vu attribuer un rôle central dans la gestion de la crise. Quand on connaît l’impunité dont elles bénéficient et le racisme structurel qui traverse l’institution, ce choix axé sur des réponses de surveillance et de sanction était la porte ouverte aux abus et au ciblage de personnes déjà particulièrement vulnérables. Le droit de filmer les forces de l’ordre s’est alors une fois de plus révélé comme essentiel pour lutter contre l’impunité et dénoncer les abus.

La gestion de la crise sanitaire a également sérieusement mis à mal les fondements de notre État de droit. Comme la LDH et de nombreux partenaires et citoyen·ne·s n’ont cessé de le rappeler [1], même en période de crise, il est essentiel que les mesures adoptées respectent les garanties procédurales de l’État de droit. Or la crise aura confirmé et accentué la prévalence du pouvoir exécutif sur le législatif. Car si le recours à des arrêtés ministériels pour prendre des mesures pouvait se comprendre dans un premier temps vu l’urgence et la situation d’un gouvernement minoritaire en affaires courantes, il aurait fallu rapidement adopter une loi avec le processus public et délibératif qu’elle implique. Les questions liées à la nécessité des mesures, à leur cohérence et leur lisibilité, à leur adéquation à l’objectif poursuivi et à leur proportionnalité étaient également centrales.

Nous avons rêvé du monde d’après où nous serions plus solidaires, plus égaux·ales et où nos droits fondamentaux essentiels — le droit à la protection de la santé, à la culture, à l’enseignement, à un logement décent, à un travail dans des conditions dignes — remonteraient au sommet de l’agenda des priorités politiques. Où nous prendrions soin collectivement des plus vulnérables d’entre nous. Ce monde est encore là, à portée de main. Et parce que l’avenir s’écrit à chaque instant du présent, la LDH restera mobilisée pour que nos droits fondamentaux puissent s’exercer dans le futur en solidarités et en collectivités, pour plus d’égalités, plus d’opportunités pour chacun et chacune de réaliser pleinement son potentiel de vie, de santé et d’humanité.

Lire en ligne.

[1] Voir notamment https://www.lalibre.be/debats/opinions/ne-pas-saper-les-fondements-democratiques-60070e3e9978e227dfae6e31

29 janvier 2021