Covid-19 / Le monde de demain – Une réduction de nos libertés fondamentales ? – Annemie Schauss

C’est en temps de crise que nos droits sont le plus en danger !

« Nul n’est censé ignorer la loi », dit l’adage. Celui-ci rappelle qu’un citoyen ne peut plaider l’ignorance lorsqu’il commet une infraction, qu’il doit connaître ses devoirs. Une lecture soucieuse des enjeux démocratiques devrait cependant élargir cette définition à nos droits, et ne pas la limiter uniquement à nos devoirs.

Car, comme nous pouvons régulièrement le constater, la méconnaissance de la loi conduit en effet de nombreuses personnes à ne pas activer leurs droits ou à rater la possibilité de les défendre devant la justice.

Or cette méconnaissance n’est pas à imputer à un manque de responsabilité individuelle mais bien à un corpus juridique toujours plus opaque. Si cette difficulté est inhérente au droit lui-même, complexe par nature, il ne faut pas pour autant négliger l’intérêt politique à ce que celui-ci reste inaccessible pour la majorité des citoyens. Faute de quoi le sous-financement de la Justice et les restrictions à nos droits et libertés pourraient se remarquer…

Certes, la Belgique n’est pas la Hongrie, et l’état de droit y est encore présent. Mais celui-ci peut toujours être fragilisé, particulièrement en temps de crise. C’est pourquoi l’atelier des droits sociaux a jugé important de faire le point sur l’état de la Justice et sur les dangers que fait peser la situation sanitaire sur nos libertés fondamentales.

Pour ce faire, l’association a interviewé Annemie Schaus, professeure de droit public et avocate au barreau de Bruxelles, désormais devenue également rectrice de l’ULB. À la fois exigeante et accessible, elle nous parle sans détours des problèmes d’accès à la Justice vécus lors du confinement et des atteintes concrètes à nos libertés fondamentales que nous vivons depuis le début de la pandémie. Ainsi, par exemple, des interdictions de manifestation. Elle nous invite également à nous emparer de ces questions d’intérêt public, rappelant que c’est dans les temps de crise que nos droits sont le plus en danger et que « les lois d’exception finissent toujours par être coulées dans le droit commun. ».

Un tel témoignage est précieux, même indispensable. La démocratie, dont la justice est un pilier, n’est pas acquise une fois pour toutes. Elle est un processus qui exige d’être questionné et défendu à chaque instant. C’est pourquoi nous devons, plus que jamais, rester vigilants.

Naïm Kharraz, gestionnaire de projet et conseiller juridique à l’atelier des droits sociaux

Cette interview fait partie de la série « Covid 19 – Des vidéos pour comprendre le monde de demain et les dangers qui pèsent sur les acquis sociaux« 

20 octobre 2020