Les mille et une vies de Joséphine Baker

Après Olympe de Gouges et Kiki de Montparnasse, Catel Muller et José-Louis Bocquet ont choisi d’illustrer l’incroyable vie de Joséphine Baker. Cinq cents pages en noir et blanc pour retracer le destin extraordinaire de cette femme qui réussira, grâce à sa personnalité hors du commun, à surmonter les obstacles que sa couleur de peau plaçait face à elle.

Freda Joséphine McDonald est née le 3 juin 1906. Elle grandit au cœur de la ségrégation raciale à Saint-Louis dans le Missouri. Entre précarité et travaux domestiques, elle se découvre une passion pour la danse. En 1925, elle embarque pour la France et devient la vedette d’un nouveau spectacle : La Revue Nègre. Si sa ceinture de banane, ses danses et ses grimaces séduisent immédiatement Paris et propulsent Joséphine au rang de véritable star, elle va largement dépasser le statut de négresse dans lequel elle aurait pu rester confinée et devenir un statut d’artiste à part entière, reconnue par ses pairs. Fascinant des artistes comme Cocteau, Le Corbusier, Picasso et même notre Georges Simenon national, elle devient, au cours des années 30, une star internationale que le monde entier s’arrache.

Loin des planches et des paillettes, Joséphine est une femme solidaire et humaniste qui se bat pour les causes qui lui tiennent à cœur. Parmi celles-ci, la lutte contre le racisme et la discrimination qui sévit aux Etats-Unis contre les gens de couleur. Car si elle est une star riche et célèbre devant qui, en France, toutes les portes s’ouvrent, elle n’oublie pas que, de l’autre côté de l’Atlantique, la ségrégation raciale ferme à double tour de très nombreuses portes. Militante pour l’émancipation des noirs aux États-Unis, elle participera d’ailleurs à la marche pour des droits civiques en 1963 aux côtés de Martin Luther King.

On retrouve aussi cette soif de liberté dans les nombreuses liaisons qu’elle a entretenues avec des hommes et des femmes tout au long de sa vie.  Idéaliste mettant en pratique ses idéaux, elle adoptera 12 enfants de nationalités différentes. Ils constitueront sa « tribu arc-en-ciel », une fraternité universelle visant à démontrer que peu importe la couleur de peau, on peut vivre ensemble comme de véritables frères et soeurs.

En somme, « Joséphine Baker », au même titre que les deux biographies précédentes de Catel Muller et José-Louis Bocquet, c’est l’histoire d’une femme qui a gagné sa liberté et son indépendante en bousculant les normes et les conventions.

Quarante ans après sa mort, l’égalité homme-femme est loin d’être acquise et le racisme est encore bien présent. Cet ouvrage, agrémenté de notes utiles sur les personnalités qui ont croisés le chemin de Joséphine Baker,  est éclairant quant au chemin qu’elle a parcouru et celui qu’il nous reste encore à faire.

Hélène Stevens (avec DMo)

« Josephine Baker » de José-Louis Bocquet et Catel, Casterman, 2016, 407 pages