Le 10 décembre, la Chambre se penchait sur le budget à allouer au « Mécanisme de prévention de la torture et de toute peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant ». Ce Mécanisme vise à mettre en place un contrôle des lieux de privation de liberté, prisons et centres fermés pour personnes étrangères. Le budget voté correspond à 22% du budget évalué par les organes chargés du Mécanisme ! La Coalition OPCAT appelle les député·es à revoir ce calcul et à attribuer aux organismes chargés de ces missions les moyens adéquats, lors de la séance plénière de ce jeudi 19 décembre.
Depuis de nombreuses années, la Coalition OPCAT milite pour que l’État belge respecte son engagement d’appliquer le Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la Torture (OPCAT), signé en 2005. Cela implique de mettre en place un Mécanisme national de Prévention de la torture et de toute peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant (MNP), qui permet de prévenir et de lutter contre les violations des droits humains des personnes privées de liberté en prison, dans les commissariats de police, dans les centres fermés pour personnes étrangères, etc.
Une loi en avril 2024
Au cours de la précédente législature, des travaux ont été menés pour mettre en place ce MNP, selon les obligations requises pour une ratification de l’OPCAT. Ces travaux ont mené à l’adoption de la loi du 21 avril 2024, malheureusement insatisfaisante, pour des raisons détaillées dans les avis successifs de la Coalition OPCAT, soit l’absence de contrôle de certains lieux de privation de liberté, le manque apparent d’impartialité et le caractère inachevé du MNP envisagé. Celui-ci n’est en effet pas déployé à l’échelle inter-fédérale. Il reste cantonné au niveau fédéral, sans inclure les entités fédérées que sont les Régions et les Communautés, chacune compétente pour les matières qui lui sont propres. Il s’agit donc en fait d’un Mécanisme non national, un M(N)P !
La Coalition OPCAT espérait que les missions du MNP puissent être menées efficacement, en respectant les prescrits internationaux, pour protéger les droits de toutes les personnes privées de liberté. Même si ces missions ne sont qu’une partie de que l’OPCAT prescrit pour un véritable MNP, elles n’en demeurent pas moins essentielles dans un régime démocratique.
4 équivalents temps plein au lieu des 18 nécessaires
Les organisations membres de la Coalition OPCAT ont pris connaissance avec effarement d’une des décisions prises en Commission de la comptabilité de la Chambre, ce 10 décembre. Alors que les organes chargés du M(N)P avaient évalué le nombre de postes nécessaires au bon accomplissement des missions – même réduites – du M(N)P, une majorité de député·es ont estimé qu’il convenait d’accorder seulement 22 % du budget requis. Le budget voté en correspond ainsi à 4 équivalents temps plein, en lieu et place des 18 nécessaires pour le travail de prévention à mener dans toutes les prisons du pays, dans tous les centres fermés pour personnes étrangères, dans toute cellule de commissariat de police.
Cette prévision budgétaire est un outrage aux droits fondamentaux ! L’ironie veut que ce soit le jour de la commémoration de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’Homme que les élu·es du parlement fédéral procèdent à ce vote…
Il faut revoir ce calcul budgétaire
La Coalition OPCAT appelle les député·es à amender ce calcul budgétaire lors de la prochaine séance plénière de ce 19 décembre, et à octroyer aux organismes qu’ils et elles ont elleux-mêmes chargés de ces missions, les moyens nécessaires pour qu’ils puissent les assumer.
La Coalition OPCAT rappelle par ailleurs que certains lieux de privation de liberté, comme par exemple les maisons de repos et de soins, les services de gériatrie, les hôpitaux psychiatriques, etc., continuent de ne pas être couverts par le dispositif mis en place par la loi de 2024. Elle appelle les autorités de tous les niveaux de pouvoir à se conformer aux standards internationaux en matière de droits humains, pour que la Belgique ne soit plus l’un des derniers pays à ne pas œuvrer dignement à la prévention de la torture et de toute peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant.
Signataires :
ACAT Belgique
Coalition Move (composée du CIRÉ, Vluchtelingenwerk, Caritas International & JRS Belgium)
Défense des enfants international Belgique
I-Care
Le Gang des vieux en colère
Ligue des droits humains
Observation Internationale des Prisons (OIP)