Défendre le droit de manifester pacifiquement

Bruxelles, le 7 mai 2024

La Ligue des droits humains a pris connaissance par la presse des arrestations survenues lors de la manifestation sur le climat de ce samedi 4 mai à Bruxelles. Des témoignages qui lui sont parvenus font état d’un usage de la force disproportionné par la police et d’un grand nombre d’arrestations.

Ce samedi 4 mai 2024, au moins deux manifestations étaient organisées à Bruxelles sur les questions climatiques et écologiques à l’appel du mouvement Extinction Rebellion. Le mouvement réclamait la fin des subventions aux combustibles fossiles et la mise en œuvre d’un plan national d’urgence pour une transition juste. Une partie des manifestant·es a bloqué la circulation de la rue Belliard, dans une action de désobéissance civile. Une autre partie des manifestant·es s’est rassemblée non loin de là, place Jean Rey, pour des prises de parole qui ne gênaient en rien la circulation. Il ne s’agissait donc pas d’une action de désobéissance civile. Selon les participant·es, ce second rassemblement avait fait l’objet d’une demande de manifestation. Cette demande n’avait pas reçu de réponse officielle mais la manifestation était semble-t-il tolérée par les autorités.

Ce deuxième groupe était composé de beaucoup de jeunes, y compris de Youth for Climate, mais aussi des personnes âgées des Grands-parents pour le climat. Selon les témoignages, l’ambiance était pacifique et conviviale. Vers 14h40, la police a formé un cordon autour de ces manifestants, les empêchant de quitter la place ou de se disperser. Toujours selon les témoignages, utilisant leurs boucliers, les policiers ont forcé les manifestants à remonter la rue Belliard jusqu’à un endroit où des activistes d’Extinction Rebellion s’étaient regroupés pour leur action de désobéissance civile. Les personnes demandant à pouvoir quitter la manifestation ont été interdites de le faire. Lors de cette intervention, la police a fait usage de la force de manière illégitime et disproportionnée. Plusieurs personnes participant à cette manifestation ont rapporté avoir été traumatisées par le traitement brutal subi lors de l’intervention de la police. La police a également procédé à plus de 130 arrestations selon plusieurs médias.

La Ligue des droits humains rappelle que le droit de manifester pacifiquement est un droit fondamental en démocratie. Même une manifestation non explicitement autorisée doit être tolérée et ne peut donner lieu à des arrestations sans motif légitime, en particulier si elle ne trouble pas l’ordre public. Elle rappelle également que tout usage de la force doit être nécessaire et rester strictement proportionné. Il appartient également aux forces de l’ordre d’intervenir avec discernement et de faire la distinction entre un rassemblement pour des prises de parole et une action de désobéissance civile, étant entendu que même dans ce dernier cas, le recours à la force ne doit intervenir qu’en dernier recours et rester proportionné. Cet amalgame opéré par la police entre des modes d’actions distincts constitue une atteinte grave à la liberté de manifester et risque de produire un effet dissuasif sur des personnes qui souhaitent exercer leurs droits fondamentaux sur un enjeu d’intérêt général comme celui du climat. C’est en ce sens que le rapporteur spécial des Nations Unies sur les défenseurs de l’environnement rappelait dans un rapport publié en février dernier que la répression des manifestations et de la désobéissance civile environnementales constitue une menace majeure pour les droits humains et la démocratie.