Une victoire devant la Cour constitutionnelle pour les personnes handicapées

La Cour constitutionnelle vient d’annuler la condition de résidence réelle d’une durée de 10 années (dont 5 années ininterrompues) sur le territoire belge qui avait été imposée aux personnes handicapées pour pouvoir bénéficier d’une allocation.

La Ligue des droits humains (LDH), les Briques du GAMP et Médecins du monde (MDM) se réjouissent de cette décision d’annulation prise par la Cour constitutionnelle. En effet, le contenu de l’article 4 de la loi du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées est ramené à ce qu’il était avant la modification législative de 2018 : la personne qui demande et bénéficie de l’allocation personnes handicapées doit avoir sa résidence principale en Belgique, peu importe la durée de cette résidence. La loi que la Cour constitutionnelle a annulé disposait que la personne bénéficiaire d’allocation pour personnes handicapées devait avoir résidé en Belgique pendant au moins 10 ans, dont au moins, 5 années ininterrompues.

La Cour constitutionnelle a donné raison à la LDH, au GAMP et à MDM en affirmant que cette loi qui ajoutait une condition de durée était contraire au principe de standstill (ou à l’effet cliquet). Ce principe jurisprudentiel est déduit de l’article 23 de la Constitution qui dispose le droit de chacune, chacun, à mener une vie conforme à la dignité humaine ; et il implique une interdiction pour l’Etat de revenir en arrière sur des protections acquises notamment en matière d’aide sociale et ce, sans motif d’intérêt général.

Concrètement, la Cour constitutionnelle décide que, d’une part, la condition de résidence inscrite dans la durée ne permet pas nécessairement de démontrer un lien suffisant avec la Belgique (elle n’empêche pas le shopping social et ne permet pas de prouver une participation quelconque de la personne handicapée à la sécurité sociale). D’autre part, la Cour constate que le législateur ne prouve pas que, l’absence de condition de résidence “expliquerait à elle seule l’augmentation du coût budgétaire de l’allocation de remplacement de revenus, étant donné qu’il peut également être fait référence à d’autres facteurs comme les extensions législatives successives du champ d’application personnel”. Aucun motif d’intérêt général ne vient donc justifier ce recul dans l’octroi de droits sociaux. Le principe de standstill est violé en l’espèce par l’Etat belge.

En outre, la Cour constate que la loi viole le Règlement européen 883/2004 en son article 6. Cet article disposant en effet que les périodes de résidence accomplies dans un autre Etat membre de l’Union européenne doivent être prises en considération et additionnées dans ce type de situation, quod non en l’espèce.

Nous ne défendons pas que les aides sociales doivent être distribuées même si les personnes n’ont aucun lien avec la Belgique, il est évident qu’un rattachement territorial doit être constaté. Mais, tout comme en matière de GRAPA, l’ajout de conditions supplémentaires et inutilement excluantes est inadmissibles. Il est indécent de faire des économies de bout de chandelle sur les populations les plus vulnérables, a fortiori sur les personnes handicapées et en situation de pauvreté. Nous nous réjouissons que la Cour constitutionnelle de Belgique aille dans ce sens !

Signataires :

  • Les Briques du GAMP
  • Médecins du Monde Belgique
  • Ligue des droits humains

20 mars 2020