Quotas d’arrestation : le ministre Jambon a-t-il menti au Parlement ?

Le ministre de l’Intérieur a-t-il menti devant le Parlement concernant l’existence de quotas d’arrestations d’exilé.e.s dans le cadre du « nettoyage » de Bruxelles ?

Les documents évoqués par la presse semblent démontrer que cette pratique, parfaitement illégale, a bien guidé les arrestations au Parc Maximilien et à la Gare du Nord au mois de septembre. La responsabilité du ministre de l’Intérieur est gravement mise en cause.

Selon une source bien informée ayant contacté la Ligue des droits de l’Homme, la police se préparait à une opération de « nettoyage » de grande envergure à l’encontre des exilés de la Région bruxelloise le 21 septembre dernier. Son objectif : la volonté d’arrêter 250 personnes. Une planification doublée d’une politique de quota parfaitement odieuse et illégale.

En septembre dernier, la LDH avait été contactée par une source anonyme bien informée qui avait été choquée par les méthodes mises en place par les autorités compétentes pour « nettoyer » la Région bruxelloise de ses exilés. Cette personne avait informé la LDH de la politique de quota poursuivie par la police dans le cadre de ces rafles et de la préparation, le 21 septembre, d’une opération de police de grande envergure visant à atteindre le quota de 250 arrestations de migrants. Une opération qui – on ne peut que s’en réjouir – a été annulée.

Revenant sur cette affaire, le député Benoit Hellings a posé une question parlementaire au ministre concernant cette opération lui demandant, entre autres, s’il était au courant de la programmation de ces arrestations, programmation assortie de chiffres précis : « 20-30 » pour les « petites opérations » et « 250 arrestations » pour l’opération (avortée) du 21 septembre.

Le ministre a tout nié en bloc.

La LDH n’est pas en mesure de vérifier l’authenticité de cette information alarmante, mais force est de constater qu’elle est parfaitement crédible dans le contexte de harcèlement inhumain auquel sont confrontés les hommes, femmes et enfants qui (sur)vivent actuellement au Parc Maximilien, à la gare du Nord et dans différents autres lieux de la capitale.

Ainsi, ce « nettoyage », planifié par les autorités, parait doublé d’une politique de quota. Selon les renseignements reçus par la LDH, un quota de 20 à 30 arrestations journalières était fixé. Si, lors des précédentes arrestations, la police ne réussissait pas à atteindre ce quota via, par exemple, les rafles matinales au Parc Maximilien, elle partait à la pêche aux migrants dans la file de distribution des repas organisés par des bénévoles. Avec la révélation de cette opération prévue le 21 septembre, il apparaît que les autorités sortent le grand jeu. Il n’y a quasiment plus d’exilés au Parc ? Il s’agira donc de les chasser tous azimuts dans Bruxelles afin de leur lancer un signal fort : quittez la région Bruxelles-capitale.

Au-delà du scandale éthique que représentent ces techniques de harcèlement, le caractère planifié et collectif, avec des quotas préétablis de personnes migrantes à arrêter, pose un grave problème de légalité. Ces rafles sont illégales en ce qu’elles constituent une violation de la dignité humaine, de la liberté de circulation et qu’elles ne respectent pas le principe de proportionnalité et de non-discrimination.

Tous aussi interpellants sont les éléments d’information démentis par le Ministre de l’Intérieur. Cet démenti pose un problème de déontologie politique majeur : si les informations recueillies sont exactes – et la LDH a toutes les raisons de penser qu’elles le sont – de quelle crédibilité parlementaire bénéficie encore le Ministre de l’intérieur, Jan Jambon ? Lui qui affirme qu’il est indécent de lui poser la question de savoir si des quotas ont été fixés à la police dans leur mission d’investir le Parc Maximilien et ses environs ! Si mensonge il y a, c’est la responsabilité du Ministre de l’Intérieur qui est en cause dans l’effectivité du contrôle parlementaire de son action. En pareil cas, peut-il légitimement continuer à exercer cette responsabilité ?

Rafle (définitions du Larousse) : « Opération policière exécutée à l’improviste dans un lieu suspect, en vue d’appréhender les personnes qui s’y trouvent et de vérifier leur identité ; Être pris dans une rafle: arrestation massive de personnes »)

30 octobre 2017