Le secret professionnel : une valeur fondamentale des droits sociaux en danger

Le Front peu commun* demande aux parlementaires fédéraux de voter contre la proposition de loi visant à lever le secret professionnel des membres du personnel des institutions de sécurité sociale. Les valeurs fondatrices du travail social sont en danger.

Le secret professionnel est une règle d’ordre public qui « tend à protéger la confiance que le citoyen doit nécessairement avoir envers certains confidents ». Des parlementaires fédéraux de la majorité ont déposé en septembre 2016 une proposition de loi visant à lever le secret professionnel des membres du personnel des institutions de sécurité sociale en les contraignant à une obligation de transmission de renseignements demandés par le procureur du Roi et surtout à « une obligation d’information active », à savoir l’obligation de déclarer au procureur du Roi des informations « pouvant constituer des indices sérieux de l’existence d’une infraction terroriste ».

L’objectif visé est de lutter contre le terrorisme. Le Front peu commun*, rassemblant la société civile et des institutions publiques concernées, fait part de son étonnement et de son profond désarroi. En effet, pour lutter contre le terrorisme, il était déjà possible de recourir aux exceptions existantes, comme l’a souligné le Conseil d’Etat. Dans son avis négatif du 29 novembre 2016, ce dernier s’inquiète du caractère vague et général de la formulation de la nouvelle exception et des personnes concernées, qui pourrait avoir pour effet, dit-il, de vider le secret professionnel « et les droits fondamentaux sous-jacents qu’il protège » de sa substance. Force est de constater que les amendements proposés en janvier 2017 par les parlementaires de la majorité ne répondent en rien à cette critique du Conseil d’Etat.

Le principal effet de la réforme proposée – sinon le seul – sera de fragiliser le lien de confiance qui est construit entre les allocataires sociaux et les travailleurs sociaux qui devront, simultanément à leur travail d’aide, vérifier auprès de chaque allocataire social qu’il n’existe pas d’indices sérieux d’une infraction terroriste. Les signataires insistent sur le fait que ce projet se situe en marge du mouvement historique de dépénalisation du droit social. Loin de mener une politique contre le terrorisme réellement efficace, cette proposition malmène les droits sociaux que sont le droit à la sécurité sociale, le droit à l’aide sociale et le droit au respect de la vie privée. En définitive, cette proposition de loi sape le travail social…un peu plus encore qu’il ne l’était déjà.

Le Front peu commun demande aux parlementaires d’analyser en détail les critiques du Conseil d’Etat ainsi que l’avis des trois fédérations des CPAS en date du 5 octobre 2016.

Les signataires demandent aux parlementaires fédéraux de voter contre cette proposition de loi afin de garantir les valeurs fondatrices du travail social.

Le Front peu commun demande également au Parlement de penser à revaloriser le travail social de façon à permettre aux travailleurs sociaux d’accompagner dignement les assurés sociaux et d’assurer leur mission de service public.

*Le Front peu commun rassemble :
La Ligue des droits de l’Homme (LDH), De Liga voor Mensenrechten (LIGA), Le comité de Vigilance en Travail Social (CVTS), La Fédération des CPAS bruxellois, La Fédération des CPAS wallons, Solidaris -Mutualité socialiste, La Fédération générale du travail de Belgique (FGTB), La Confédération des syndicats chrétiens (CSC), L’Association de Défense des Allocataires sociaux (l’aDAS), Le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP) , Netwerk tegen Armoede, Le Forum – Bruxelles contre les inégalités, Le Collectif Solidarité contre l’exclusion, Ecole en Colère , La Fédération des services sociaux, Le CIRE, La fédération wallonne des assistants sociaux de CPASF (Fewasc), MOC Wallonie-Bruxelles, Tout Autre chose

2 février 2017