Le Comité des Droits Économiques, Sociaux et culturels (DESC) des Nations Unies rend ses recommandations à l’Etat belge

Le 10 mars 2020, à l’ombre du coronavirus, le Comité DESC des Nations Unies a rendu ses recommandations à l’Etat belge, en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Les 19 et 20 févriers 2020, lors de sa 67ème session, le Comité a en effet examiné le cinquième rapport périodique de l’État belge. La Ligue des droits humains avait à cette occasion rendu un rapport alternatif en la matière. 

Même si les priorités sont ailleurs en raison de la crise sanitaire que nous traversons, il nous a paru important de faire connaître les recommandations du Comité DESC pour préparer la suite. La LDH se réjouit de voir repris dans ces recommandations de nombreux points relevés dans son rapport.

Dans ses principaux sujets de préoccupations, le Comité met notamment en évidence : 

  • l’absence d’applicabilité du Pacte en droit interne ;
  • la nécessité d’élargir le mandat du futur Institut national des droits de l’Homme ;
  • le besoin d’intensification des actions pour la réduction des gaz à effet de serre ;
  • la persistance des discriminations à l’égard des personnes migrantes et la nécessité de garantir un niveau de vie digne pour toutes les personnes demandeuses d’asile, “y compris dans le cadre de demande ultérieure” ;
  • le manque de reconnaissance des situations d’intersectionnalité “des femmes appartenant aux segments les plus marginalisés de la population” (il s’agit de la double discrimination sur la religion et sur le genre dont sont victimes les femmes portant le voile) ;
  • le report d’interventions chirurgicales des personnes intersexes en l’absence de nécessité ou d’urgence médicale et ce, jusqu’à ce que les personnes elles-mêmes soient capables de donner leur consentement éclairé.

La LDH se réjouit particulièrement que soient mis en lumière par le Comité :

  • la problématique des inégalités hommes-femmes et les différentes pistes de solution que l’Etat belge devrait mettre en place (notamment quant à  l’écart salarial, au congé parental, à la représentation des femmes à tous les niveaux de l’administration publique – en particulier aux postes de décision -, ainsi que leur participation aux fonctions de direction dans le secteur privé, et quant à la lutte efficace contre les violences faites aux femmes) ;
  • l’exigence d’amélioration des conditions de travail des travailleuses et travailleurs domestiques ;
  • la demande d’une révision à la hausse de la sécurité sociale des travailleur·euse·s indépendant·e·s ;
  • l’intensification des efforts pour remédier aux défis que rencontrent certains groupes de la population, notamment les personnes handicapées, les jeunes, les personnes âgées et les personnes migrantes, pour accéder à l’emploi ;
  • la garantie “en droit et en pratique” de l’exercice du droit de grève en pleine conformité avec le Pacte ;
  • la nécessité de l’adoption d’un “cadre normatif et réglementaire de nature contraignante” qui impose aux entreprises d’exercer une diligence en matière de droits de l’homme dans leur activité et dans leurs relations commerciales ;
  • l’importance d’une “mobilisation maximale des ressources pour la réalisation progressive des droits économiques et sociaux”, ce qui implique de réexaminer la fiscalité des entreprises et de “renforcer les mesures contre l’évasion et la fraude fiscale” ;
  • le besoin de mécanismes pour permettre aux femmes migrantes en séjour irrégulier de dénoncer les violences dont elles sont victimes sans crainte d’être expulsées ;
  • la nécessaire augmentation des minima sociaux au-dessus du seuil de risque de pauvreté et la garantie de l’accès aux services publics de qualité pour les enfants en situation de pauvreté ;
  • l’augmentation qui doit être faite du nombre de logements sociaux, la lutte qui doit être menée contre les logements vides et le besoin d’un encadrement des loyers sur le marché locatif ;
  • la nécessaire interdiction d’expulser sous contrainte en l’absence d’une solution de relogement et l’enregistrement des expulsions qui doit se faire de manière systématique ;
  • la garantie d’une fourniture minimale d’eau, de gaz et d’électricité et la mise en place d’un tarif social pour l’eau ;
  • et enfin, la nécessité d’une véritable collecte des données en matière de sans-abrisme.

La LDH espère que l’Etat belge ne restera pas sourd face à ces nombreuses recommandations. Il y a du travail en matière de droits économiques, sociaux et culturels, beaucoup de travail. L’Etat doit absolument prendre les mesures nécessaires au respect de ces droits fondamentaux qui sont essentiels pour que chacune, chacun, puisse mener une vie digne.

31 mars 2020