Haren : « 3 multinationales pour une mégaprison »

Alors que les promoteurs de la mégaprison n’ont toujours donné aucune information précise sur la manière dont devrait être financé ce projet démesuré, une nouvelle étape est franchie. La Régie des bâtiments et trois multinationales interviennent dans les recours au Conseil d’Etat introduits par les citoyens, contre eux. Les 3 multinationales ont des pratiques douteuses à plus d’un titre. Les signataires demandent aux députés de faire la lumière sur Cafasso et le financement de la mégaprison. L’Etat peut-il s’engager avec des multinationales qui ont prouvé leurs défaillances régulières comme Macquarie ? Quel contrôle parlementaire existe-t-il des activités de Denys NV qui dispose de larges contrats avec l’Arabie Saoudite alors que l’ONU a condamné ce pays pour ses exactions dans la guerre du Yémen ? Denys NV a-t-elle encore des activités commerciales avec les autorités du Yémen sur le pipeline LNG qui est au cœur de cette sale guerre ? Les députés peuvent-ils accepter qu’une structure comme PPP infrastructure Investment soit mise en place par Cafasso à Amsterdam alors que tout indique qu’il s’agit d’un dispositif d’évasion fiscale ?

Mégaprison : le règne de l’opacité et du déséquilibre des forces

Les recours introduits par les opposants à la mégaprison de Bruxelles/Haren arrivent au Conseil d’Etat. Quatre parties se sont jointes à la cause, CONTRE les citoyens : la Régie des Bâtiments, et trois multinationales qui font partie du consortium Cafasso, soumissionnaire préférentiel pour le projet toxique de mégaprison.

Cafasso n’a toujours pas de personnalité juridique, au motif que le marché de la mégaprison n’a pas encore été définitivement attribué. Ce sont donc trois multinationales qui le constituent qui se joignent à la cause :

• Macquarie Corporate Holdings Pty Limited, Société de droit australien ayant son siège à Level 6 50 Martin Place Sydney, NSW 2000 Australie,
• PPP Infrastructure Investment B.V. Société de droit néerlandais, ayant son siège Claude Debussylaan 24, 1082MD Amsterdam,
• Denys NV, ayant son siège Industrieweg 124 à 9032 GENT.

L’implication de ces multinationales dans les recours introduits par les opposants rappelle encore le déséquilibre des forces en faveur des entreprises qui veulent privatiser la détention.

La mégaprison n’est pas un projet d’intérêt public, mais une opération de spéculation privée

La presse a abondamment souligné il y a quelques mois que ces multinationales ont fait inscrire une clause d’indemnité dans le cas où la mégaprison serait heureusement annulée. Elle atteindrait 20 millions d’euros. La hauteur exacte de cette indemnité reste inconnue, y compris des députés de la Chambre, y compris des députés de la Commission de la Justice, puisque Cafasso, le ministre de l’Intérieur et le ministre de la Justice refusent tous trois de transmettre ces informations. Un déni de démocratie et de transparence déjà observé ces derniers mois, dans ce dossier comme dans de trop nombreux autres.

Ces multinationales n’ont donc littéralement rien à perdre dans ce dossier, puisqu’elles seront de toute manière indemnisées. Quel intérêt vont-elle défendre auprès du Conseil d’Etat, si ce n’est leur intérêt à tirer profit de l’enfermement des détenus de Bruxelles, profits qui sont garantis par l’Etat belge et son système de Justice employé ici comme une vache à lait ?
Des multinationales aux pratiques douteuses

Nous déplorons de constater que ces multinationales ont en outre des pratiques douteuses (informations plus détaillées ci-dessous) :

• Macquarie, est épinglé dans plusieurs affaires d’évasion fiscale. Elle est connue pour sa gestion calamiteuse de l’eau en Angleterre. Elle est également confrontée à ses pratiques inacceptables aux USA dans des PPPs que Donald Trump veut étendre.
• PPP Infrastructure Investment B.V., partage toutes les caractéristiques d’un point d’ingénierie fiscale qui permettra à Cafasso d’éluder les impôts belges et européens.
• Denys NV, dispose de contrats importants avec l’Arabie Saoudite, qui viole allègrement les droits de l’homme dans son pays, mais également au Yémen. L’Arabie Saoudite a été condamnée par l’ONU pour le bombardement de civils au Yémen, où Denys a été réparer un pipeline au cœur du conflit.

Les opposants à la mégaprison de Bruxelles défendent une politique carcérale respectueuse des droits fondamentaux et publique, la sauvegarde d’un environnement vivable et une démocratie digne de ce nom. Ils se trouvent face à des institutions qui représentent l’Etat belge, accompagné désormais de trois multinationales aux pratiques douteuses.

• Quelles justifications les partis politiques des exécutifs fédéraux et régionaux donnent-ils au choix de ces partenaires privés pour une mission qui incombe par essence à l’Etat ? Comment justifient-ils d’engager l’Etat dans un contrat, dont les détails ne sont toujours pas connus, pour un coût estimé à 3 milliards d’euros, avec des entreprises aux pratiques douteuses, et alors que tout indique qu’un système d’évasion fiscale est mis en place ?
• Dans ces conditions, comment les députés justifient-ils le choix d’un PPP qui sera in fine payé par les contribuables et le budget de la Justice pourtant déjà trop maigre ?
• Peut-on sacrifier au libéralisme économique la question fondamentale du sort de ceux que notre société enferme ?
• Quel contrôle les députés réalisent-ils des activités de Denys n.v. qui dispose de contrats importants avec l’Arabie Saoudite, condamnée par l’ONU pour avoir bombardé des civils au Yémen ?
• Les députés considèrent-ils qu’une entreprise basée en Belgique peut réaliser du commerce avec le régime contesté du Yémen, soutenu par l’Arabie Saoudite, sur le pipeline LNG qui est au cœur du conflit, et alors que l’Arabie Saoudite bombarde des civils yéménites ?

Les associations signataires* demandent des réponses à ces questions urgentes.

Signataires :
Comité de Haren, La Ligue des Droits de l’Homme, Observatoire International des Prisons – Section belge et Respire asbl

Lire l’annexe Sur les pratiques douteuses de trois multinationales de Cafasso

14 septembre 2017