Big Brother Awards 2015 : les lauréats

Le 15 octobre 2015, le KVS a accueilli la cérémonie de remise des Big Brother Awards. Chaque année, cette cérémonie “récompense” ceux et celles qui portent le plus atteinte à la vie privée en Belgique. Pour cette 5e édition, le jury, composé de spécialistes en matière de vie privée, a envoyé un signal de sensibilisation fort en choisissant le screening des élèves en vue de détecter leur radicalisation. Le public, qui a pu voter sur le web, a choisi les applications.

Cette année, le prix du jury a souhaité, par le choix de son lauréat, mettre en lumière la tendance croissante, au sein des écoles, effectuer un screening (également en ligne) des élèves pour détecter leur radicalisation. Cette procédure de screening avait été nominée par l’association flamande Kinderrechtencoalitie. “Ce phénomène relève de la surveillance sociale. Nous constatons que les techonologies existantes, qui bénéficient d’un large consensus au sein de la société, sont exploitées de telle sorte qu’elles dépassent totalement la limite de l’acceptable. La fin ne justifie pas les moyens. Il s’agit d’une trahison sévère de la confiance entre l’école et l’élève”, explique le jury. En faisant ce choix, c’est la méthode – problématique – que le jury condamne, sans viser une école en particulier. “C’est un bon exemple de l’excès d’une école dans un climat spécifique. Sans vouloir condamner, nous remettons cette récompense plutôt pour avertir de ce qu’il se passe. Dans le contexte actuel, certains groupes sont visés. Plutôt détecter la radicalisation à titre préventif, il faudrait appliquer utiliser la confiance comme fondement. En créant de la crainte et de la méfiance, les enfants pourraient les considérer comme des valeurs fondamentales.

Le prix du public a été décerné aux applications gourmandes en données. L’Orde van Vlaamse Balies, qui soutenait également cette nomination, a nominé ces applications à cause de leur récolte massive de données personnelles, de leur politique souvent très vague en matière de vie privée et de l’attitude laxiste du consommateur par rapport à cette récolte de données. “Les applications vous connaissent et savent où vous vous trouvez. La politique en matière de vie privée manque souvent de transparence quant aux raisons et à la manière dont tant de données personnelles sont rassemblées. De plus, les utilisateurs n’en ont pas assez conscience ou ne prennent pas ce problème au sérieux”. En faisant ce choix, le public fait part de son inquiétude quant à la vaste récolte de données personnelles opérées par certaines applications.

Les Big Brother Awards sont organisés par la Liga voor Mensenrechten, en collaboration avec la Kinderrechtencoalitie, l’Orde van Vlaamse Balies, la Vlaamse Vereniging van Journalisten, la Ligue des droits de l’Homme, European Digital Rights, datapanik.org, Mediawijsheid et le Théâtre royal flamand de Bruxelles.

Dans le cadre de cette édition, La LDH avait nominé le fichier BNG.

A l’occasion de la remise de prix, elle avait organisé un débat Fichier BNG: 1,6 millions de criminels potentiels? sur ce thème avec, comme invités, Raf Jespers, avocat chez Progress Lawyers Network et auteur de « Souriez, vous êtes fichés – Big Brother en Europe » et Olivier Bogaert, Commissaire à la Computer Crime Unit et spécialiste des nouvelles technologies en charge de la prévention.  Le débat était animé par Mathieu Beys, auteur de « Quels droits face à la police ».

La récente annulation par la Cour constitutionnelle de la loi relative à la rétention des données a démontré que la politique sécuritaire est difficilement compatible avec certaines libertés fondamentales telles que le respect de la vie privée. Une vie privée qui est amenée, de plus en plus souvent, à devoir céder le pas face au rouleau compresseur sécuritaire. A cet égard, les services de police et de renseignements bénéficient d’importants moyens. Si l’obtention et l’analyse d’informations est légitime et utile dans le cadre du travail des forces de l’ordre, le cadre de leur utilisation et de leur conservation ne va pas sans poser de questions.

De nombreuses questions demeurent quant à la banque de données nationale générale (BNG), tels que les délais (extrêmement longs) de conservation, les données qui y sont conservées (photographies, etc.), les personnes qui peuvent y figurer (mineurs dès 14 ans) ou encore des contrôles sur leurs utilisations.

Pour en savoir plus sur ce sujet, lisez l’article « BNG: la vie des autres«