SOS Bonheur Saison 2 : Noir, c’est noir

« SOS Bonheur – saison 2 » est un signal d’alarme talentueux et salutaire face à un avenir oppressant qu’il s’agira, au quotidien, de veiller à ne pas construire.

De nombreux lecteurs du magazine Spirou ont été marqués au fer rouge, il y a 30 ans, en découvrant, entre Les femmes en blanc et les Tuniques Bleues, la série dystopique de Griffo et Van Hamme « SOS Bonheur ». Un choc narratif, esthétique et thématique qui présentait un cauchemar orwellien issu d’un dérapage démocratique larvé où, de manière pernicieuse, les libertés des individus étaient grignotées par l’Etat et les entreprises. Avec le recul, les questions mise crue(lle)ment en lumière (la sécurité, la liberté d’expression, le contrôle social…) se lisent comme un révélateur des angoisses citoyennes d’un milieu des années 80 marquées par la révolution conservatrice de Reagan et de Thatcher.

Cette seconde saison n’est pas une suite mais bien, air du temps oblige, un reboot.
Tout comme sa saison 1, « SOS Bonheur » joue la carte de l’uchronie en présentant au lecteur un miroir monstrueusement outré de notre actualité. Desberg, le scénariste, pousse tous les curseurs dans le rouge pour dépeindre une société totalitaire où le pire des deux mondes (l’ultra-libéral et le stalinien) aurait accouché d’un quotidien marqué par la privatisation de la vie privée, le retour à l’ordre moral, la censure historique et la ségrégation des minorités. Un monde qui offre un vernis de paix sociale en rejetant les précaires et les étrangers hors des enceintes des villes et en surveillant l’ensemble des citoyens.

Si l’ancrage à l’actualité rend un peu prévisibles le traitement de certaines thématiques, il n’en constitue pas moins, à l’image de la formidable série anglaise « Black Mirror », une réflexion cohérente et désespérée sur les dérives potentielles (mais malheureusement crédibles) de notre démocratie.

« SOS Bonheur – saison 2 » est un signal d’alarme talentueux et salutaire face à un avenir oppressant qu’il s’agira, au quotidien, de veiller à ne pas construire.

« S.O.S. Bonheur, saison 2 tome 1 » par Griffo et Desberg, Aire Libre Dupuis, 2017, 128 pp